Les éditions du CNRS rééditent « Les atomes », le livre de Jean Perrin publié il y a un siècle 1.
Introduite dès l’Antiquité, l’hypothèse atomique est l’hypothèse d’une structure discontinue de la matière à l’échelle microscopique, cette matière étant constituée de « briques élémentaires » que sont les atomes.
Cette hypothèse n’a réellement commencée à recevoir de support expérimental qu’avec le développement de la chimie quantitative au XVIIIe siècle. Dans la communauté des physiciens, certains, comme les « énergétistes », sont restés hostiles à l’hypothèse atomique jusqu’au début du XXe siècle, en dépit des succès de la « théorie cinétique des gaz » développée avec virtuosité par Maxwell et Boltzmann dans la seconde moitié du XIXe siècle 2.
Un tournant s’opère en 1905 lorsque Einstein donne la première description théorique correcte du mouvement Brownien, un curieux mouvement d’apparence aléatoire, découvert expérimentalement en 1826 par le botaniste écossais Robert Brown.
Inspiré par le travail théorique d’Einstein, le physicien français Jean Perrin (1870-1942) réalisa vers 1908 un ensemble d’expériences consacrées à le mesure du nombre d’Avogadro. Les résultats convergents de ces expériences finiront par emporter l’adhésion de la communauté scientifique en faveur de l’existence des atomes ; l’ensemble de ces travaux sont résumés dans le livre 3. Jean Perrin a reçu le prix Nobel de physique 1926 « pour ses travaux sur la structure discontinue de la matière, et en particulier pour sa découverte de l’équilibre de sédimentation.«
Paradoxalement, l’enseignement français resta longtemps à la traine. Ainsi, le physicien français Philippe Nozières écrit-il dans sa biographie de Pierre-Gilles de Gennes 4 :
« Nous nous retrouvons ensemble rue d’Ulm en novembre 1951, dans une promotion qui, pour la première fois, contient une majorité de physiciens. Les deux premières années sont consacrées à la licence, d’abord la physique puis la chimie. Hélas, l’enseignement de la physique à la Sorbonne est sclérosé, entièrement fermé à la physique du XXe siècle. La relativité et la mécanique quantique, qui ont changé le monde, n’existent pas. La thermodynamique ignore la physique statistique – même les équations de Maxwell, vieilles de 75 ans, sont renvoyées à un stade ultérieur. »
Les mesures les plus récentes du nombre d’Avogadro 5 donnent la valeur numérique :
NA = 6.022 140 82 (11) × 1023 mol−1
Orientation bibliographique
- Jean Perrin ; Les atomes, Librairie Félix Alcan (1914), réédité par Flammarion (1991), ISBN 978-2-08-081225-4, avec une préface du physicien français Pierre-Gilles de Gennes, prix Nobel de physique 1991.
- Jean Perrin ; Mouvement Brownien et réalité moléculaire, Annales de Chimie-Physique (1909), 5-114, Gallica (BNF).
- Louis De Broglie ; La réalité des molécules et l’œuvre de Jean Perrin, Académie des Sciences (17 décembre 1945), pdf.
- Alain Fuchs ; Pourquoi il faut relire «Les Atomes», Le Journal du CNRS (2015), web.
- Contribution de Jean Perrin à la validation de l’hypothèse atomique et de la théorie cinétique des gaz, Concours Général des Lycées (2011), pdf.
Notes
- Jean Perrin ; Les atomes, Librairie Félix Alcan (1914). ↩
- Anouk Barberousse ; Ludwig Boltzmann, les théories physiques et les atomes, Images de la Physique (2007), pdf. On pourra lire également du même auteur : La mécanique statistique de Clausius à Gibbs, Belin (2002), ISBN 978-2-7011-3073-6. ↩
- Jean Perrin ; Les atomes, Librairie Félix Alcan (1914). ↩
- Philippe Nozières ; Pierre-Gilles de Gennes – Les années de jeunesse, Images de la Physique (2007), pdf. ↩
- G. Mana et al. ; Correlation of the NA measurements by counting 28Si atoms, Journal of Physical and Chemical Reference Data 44 (2015), 031209, pdf. ↩